La réalité des enfants et ados transgenres
Les enfants et adolescents transgenres représentent un sujet particulièrement délicat et qui fait débat dans la société. Il aura déjà fallu très longtemps avant de comprendre que les transidentités ne relevaient pas d’une maladie mentale, il faudra encore plus longtemps avant d’accepter d’écouter les enfants et jeunes et ne pas mettre leur questionnement sur le dos d’une crise d’adolescence passagère. Il est important d’écouter les enfants et de les accompagner au mieux dans leur transition, et ce, dès le moment où ils mentionnent ce besoin.
Des chiffres très bas
Le propos sont très souvent alarmistes et la désinformation fait rage en ce qui concerne les enfants et ados transgenres. Et pourtant, il ne sont que 1,2 à 2,7% de jeunes à exprimer l’envie d’exprimer un genre différent de celui qui leur a été assigné à la naissance. Entre les nombreuses institutions qui discriminent ces enfants (monde éducatif, culturel et sportif) mais aussi le harcèlement scolaire subi, ces jeunes peuvent ressentir un mal être, voir développer un état dépressif pouvant engendrer des idées suicidaires. Il est important de ne pas laisser les bien pensant débattre d’un sujet qu’ils ne maitrisent absolument pas au prétexte des dérives de la « théorie de genre » brandie par certains.
Exagérations et mythes sur les enfants transgenres
L’image de l’enfant est encore trop associée à la pureté et c’est ce qui va exacerber le débat. On sexualise alors des jeunes, mélangeant sexe et genre, alors qu’ils ne demandent qu’à exprimer le genre avec lequel ils se sentent en adéquation. Pour le sociologue Arnaud Alessandrin, « ils sont également perçus comme neutres en termes de genre, alors que c’est totalement faux! Sur le plan de la psychologie du développement, les enfants prennent très tôt conscience de leur genre et des différences genrées.» D’ailleurs selon les statistiques, parmi les jeunes personnes trans ou en questionnement, 27,3% disent l’avoir su avant l’âge de 8 ans, 17,9% entre 8 et 11 ans et 54,8% à 12 ans ou plus.
La question médicale écartée
Le débat est le plus souvent politique et non médical. Et quand on essaye d’envisager un traitement sur des enfants, cela devient vite inconcevable dans la tête du grand public. Or, on ne se pose pas cette question dans les cas de puberté précoce chez les petits filles cisgenres. Ce sont des généralisation abusives et des propos mensongers qui conduisent actuellement certains états aux US à la décision de suspendre les traitement hormonaux pour les personnes transgenres.
Une transition très encadrée pour les enfants aussi
Concrètement, actuellement en France, lorsqu’un enfant fait état de son besoin de vivre dans un genre différent de celui qui lui a été assigné à la naissance, il a la possibilité d’être pris en charge en consultation spécialisée (avec le soutien de ses parents bien évidemment). Par exemple, en Ile de France, c’est le cas de 600 enfants à ce jour. Dans ce cadre, il n’est jamais proposé aucun traitement et encore moins d’intervention chirurgicale avant la puberté. Pour le Dr Anne Bargiacchi, il est important de préciser le rôle des soignants: «Notre objectif est de les accompagner sur ce qui relève de la dimension sociale de la transidentité, soit de les aider à explorer leur genre, soit d’appuyer leur besoin de transition sociale. Certain·es, même très jeunes, ont déjа modifié leur expression de genre, d’autres se situent davantage dans le registre de la non-binarité.» Il est également important d’accompagner la famille et de ne pas pathologiser la situation. Il faut donc éviter de proposer des soins psychiatriques qui seraient centrés uniquement sur l’enfant par exemple. Il est également du devoir du médecin de ne pas interférer auprès des familles et de se libérer du discours qui ramène le genre au sexe biologique.
Un diagnostic pour simplifier la vie des jeunes transgenres
Si l’on prend soin à ne pas médicaliser et psychiatriser les enfants transgenres, il est toutefois nécessaire de faire établir un diagnostic de dysphrorie de genre. C’est un passage obligatoire pour l’aspect administratif, à savoir obtenir la possibilité de faire reconnaître le genre de l’enfant à l’école notamment et ainsi éviter le mégenrage. Car chaque fois qu’on utilise le mauvais pronom pour qualifier une personne transgenre, c’est un déni de son identité qui donne un sentiment de solitude et de découragement. Il est donc souhaitable de faire les démarches et d’accompagner l’enfant au mieux pour que tout son environnement soit le plus bienveillant possible. De plus, ce diagnostic servira par la suite à entamer les démarches médicales (traitements hormonaux ou opération chirurgicales).
Laisser le temps aux enfants et ados
Surtout, il est important de laisser du temps à tout le monde. C’est pour cela qu’un traitement bloqueur de puberté (réversible) peut être prescrit. Car celui-ci permettra au jeune d’apprécier la situation et d’élaborer la mise en place d’un traitement hormonal ou de laisser la puberté reprendre son cours. Une sorte d’étape transitoire qui permet d’éviter les angoisses liées aux modifications corporelles de l’adolescence. C’est donc pour favoriser leur santé mentale avant tout, sans engager réellement de processus irrémédiable. Les traitements hormonaux proposés par la suite seront semi-réversibles et interviendront après la puberté. Quant à la chirurgie, il faudra attendre 16 ans pour se voir proposer une torsoplastie, et être majeur pour toute autre opération de réassignation de genre.
L’accompagnement des enfants doit donc être fait par des professionnels tout en évitant de médicaliser à outrance. Il s’agit surtout d’aider parents et enfants à réfléchir aux différentes options qui seront possibles par la suite et à faire en sorte qu’iel se sente bien. Au lieu de brandir l’argument selon lequel à cet âge, les personnes ont plus de chance de regretter, sans savoir que les dé-transitions représentent un infime pourcentage, mieux vaut se concentrer sur le bien-être des jeunes transgenres et en questionnement. Une évolution qui se fait tout doucement.
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